Au Sud-Kivu : la communauté autochtone de Kabare s’engage à la protection de l’environnement

Aux villages de Kashanje-Cibinda, Tshombo-Buyungulu, et Kakenge-Mululu, dans le groupement de Miti en territoire de KABARE, dans la province du Sud-Kivu, les femmes issues de la communauté des peuples autochtones (PA), connu généralement sous le nom des Pygmées (BAMBUTI, BATWA) ont réitéré leur engagement quant à la protection de l’environnement et la préservation des espaces forestiers en ce jour où l’humanité célèbre la journée mondiale de l’environnement, le 5 juin de chaque année.

Lors d’une rencontre collective avec la cellule de communication de la Caritas Goma, les femmes de différentes communautés des TWA, encadrées  dans le cadre du projet “Femmes en Action” / Savoirs, droits et leadership :  action par et pour les femmes pour l’adaptation aux changements climatiques,  financé par Affaires mondiales Canada (AMC), et mené en consortium entre deux organismes canadiens de coopération internationale, la Fondation Paul Gérin-Lajoie et Jane Goodall Institute (JGI) Canada, ont montré et exprimé leur intérêt quant à la préservation de la nature et de l’écosystème qui est l’un de principaux objectifs que poursuit le projet Femmes en Action en plus de mener un plaidoyer en faveur de l’autonomisation des femmes et de leurs droits fonciers et environnementaux, ainsi qu’à la mise en œuvre d’activités de renforcement de capacités connexes. 

Ces peuples autochtones ou encore « gardiens de la forêt » qui entretiennent des liens intrinsèques avec les forêts, déclarent sans ambages que le sort de l’humanité est une affaire de tous. Et, grâce aux sensibilisations prévues et données par le projet Femmes en Action sur les perturbations climatiques, le dérèglement des pluies, la perte de richesse des terres et les conséquences de la surexploitation des forêts, l’éboulement des terres etc. Les BATWA, bénéficiaires dudit projet, disent être prêt-es à changer leur mode de vie au profit de l’humanité.

C’est le cas de Agnesi Malosi, 68 ans, qui  fait partie de la communauté des TWA, au village Muyangi, qui grâce aux sensibilisations sur la protection de l’environnement, a  intégré le groupe  des femmes TWA qui ont érigé une petite pépinière communautaire.

Légende : Agensi Malosi, sourire aux lèvres, expose fièrement sa plantule de Markhamia lutea à la pépinière communautaire de BAMBUTI, au village Muyangi Crédit photo : Waridi Kone (Caritas Goma)

« Je suis veuve et mère de 10 enfants et 13 petits enfants. J’ai 68 ans ou plus, (rire!). C’est ma petite fille qui m’a sensibilisée sur les bienfaits des arbres et la protection de l’environnement. Aujourd’hui, malgré mon âge avancé, je suis fière de l’accompagner à la pépinière pour sarcler la mauvaise herbe. Ma petite fille croit sincèrement que nos ancêtres ont participé à la détérioration du climat ou de l’environnement. Et maintenant, je l’aide à réparer au mieux ». 

Si Agensi Malosi parle de sa contribution à la réparation de l’environnement, Furaha Mwakusula, sexagénaire, pense à son feu mari qu’elle aurait souhaité voir participer à la lutte pour la protection de l’environnement. Aux dires de Furaha, qui se considère comme gardienne de l’environnement, les hommes TWA ont également leur part de responsabilité et devraient également bénéficier des activités de sensibilisation sur la protection de l’environnement. 

À l’en croire, c’est surtout les hommes qui poussent leurs femmes à couper les arbres pour la vente ou le bois de chauffe. Or les arbres libèrent de l’oxygène, ce qui est essentiel à la survie de nombreuses espèces, y compris l’espèce humaine. Raison de plus de les protéger car, grâce aux arbres, l’air est purifié et la croissance de la vie animale sur terre est assurée.

En effet, les chiffres parlent d’eux-mêmes. La République démocratique du Congo (RDC), qui recouvre la majorité du bassin du Congo, a perdu 490 000 hectares de forêt primaire en 2020, selon le rapport Global Forest Watch 2020. Avec des partenaires clés œuvrant dans l’environnement, le projet Femmes en Action compte intégrer les femmes dans la recherche de solutions durables dans la protection de l’écosystème. Ces écosystèmes sont dégradés, notamment par les pratiques agricoles extensives sur brûlis et les activités minières, sans compter la pression démographique engendrée par les mouvements de population occasionnés par les conflits armés. 

Les personnes autochtones (PA) représentent 20 % des bénéficiaires ciblés par le projet Femmes en Action. Le projet prévoit, d’ici 2026, l’amélioration des conditions de vie et la résilience aux changements climatiques  de 4500 jeunes et femmes entre 15 et 49 ans, notamment autochtones et impactées par les conflits, qui dépendent de l’agriculture et des produits et services liés aux forêts du Sud et Nord- Kivu.

Crédit photo : Waridi Kone (Caritas Goma)

Chizungu Ntavanu, Président du Conseil UMOJA LA WAMBUTI et Mwami de TWA, a quant à lui loué les efforts du projet Femmes en Action et a promis de marcher pas à pas avec ledit projet jusqu’à l’atteinte des objectifs assignés.

« En tant que TWA et Président de ma communauté, il est de mon devoir de parler à mon peuple sur les conséquences de la déforestation. Nous vivons au 21ème siècle et nous ne sommes plus autorisés à vivre dans des forêts car désormais transformées en parc national. Les efforts d’intégration mises en œuvre, en faveur de la sédentarisation des PA par plusieurs organisations, rencontrent petit à petit du succès. Aujourd’hui, nos femmes et filles sont instruites et accompagnées dans les activités génératrices de revenus ou encore les AVEC par des experts du projet Femmes en Action. De cette manière, l’on devient petit à petit autonomes grâce à la Caritas Goma et ses partenaires financiers. Aujourd’hui, manger du gibier ou couper un arbre au parc devient un risque inutile à prendre. Et nous savons que cette terre ne nous appartient pas à nous seuls. Il est de notre devoir de veiller à ce qu’elle ne disparaisse pas ».

Crédit photo : Waridi Kone (Caritas Goma)

Présentée par la Banque mondiale comme étant un “pays solution” aux changements climatiques en raison de ses nombreuses forêts et de ses ressources en eau douce et en réserves minérales, la République démocratique du Congo (RDC) prend la question de la protection de l’environnement très au sérieux. En effet, des études dans le domaine démontrent qu’en l’absence de progrès pour l’adaptation aux changements climatiques, près de 16 millions de personnes pourraient basculer dans la pauvreté d’ici 2050 en RDC. L’augmentation des températures pourrait, à elle seule, entraîner un risque accru d’insécurité alimentaire et de prolifération de maladies hydriques comme le choléra.

Toutefois, pour une bonne adaptation aux changements climatiques, les priorités et les besoins des femmes doivent être pris en compte dans les projets de développement ainsi que pour leur financement. Les femmes prendront ainsi  part aux  décisions au niveau national sur des initiatives liées aux changements climatiques où tout un chacun est appelé à préserver  l’environnement dans son milieu de vie au-delà  des projets.