Le projet FIERES, une alternative à la déscolarisation au Mali

Les activités terrain du projet FIERES (Filles et éducation résilientes) vont bon train cet été 2024 ! En effet, la formule éducative intensive de la SSA/P (Stratégie de Scolarisation Accélérée/Passerelle) rejoint de plus en plus de garçons et filles de 8 à 12 ans, non scolarisés ou déscolarisés précoces. Grâce à cette stratégie, leur transfert dans le circuit formel de l’éducation, après neuf mois d’apprentissage dans les centres, est un succès !  Le Ministère de l’Éducation Nationale du Mali (MEN) appuie la SSA/P qui répond à des problématiques récurrentes au Mali :
– La déperdition scolaire des filles et adolescentes
– La présence d’enfants déscolarisés et non scolarisés au niveau des communautés ciblées par le projet
– La détermination des parents pour l’ouverture des centres
– L’irrégularité de fréquentation des enfants au niveau des écoles classiques conduisant à la déscolarisation massive.

Ainsi, lors du premier semestre de l’an 1, le projet FIERES a ouvert 20 centres de la Stratégie de Scolarisation Accélérée/Passerelle (SSA/P) dans trois régions, soit au total quatre centres par partenaire. Ces centres ont permis de recruter et de former 25 animateurs-trices, dont 12 femmes, à l’approche SSA/P. En parallèle, 104 membres (dont 58 femmes) ont été élus ou désignés pour siéger dans les Comités de Gestion des Centres (CGC).
La première cohorte a accueilli 588 apprenant-e-s, dont 341 filles, représentant 57,99 % des inscrits.

Cette approche a été choisie en raison de ses résultats probants dans le domaine de l’éducation. La mise en œuvre a débuté par la sensibilisation des communautés et des autorités locales sur l’importance de la scolarisation, obtenant ainsi leur adhésion et engagement au projet pour assurer la pérennisation des acquis. Ensuite, les cibles (filles et garçons âgés de 8 à 12 ans) ont été identifiées et les Comités de Gestion des Centres (CGC) ont été mis en place. Les appuis financiers et matériels ont permis la mise en place d’infrastructures éducatives provisoires, l’accompagnement en termes de contenu éducatif (programmes scolaires, manuels, fournitures), le soutien technique de gestion des centres et le recrutement et la formation des animateurs-trices.

Adhésion de la Communauté
La Stratégie de Scolarisation Accélérée (SSA/P) repose sur des principes fondamentaux tels que l’adhésion communautaire, la motivation des apprenant-e-s, l’engagement des services déconcentrés de l’éducation et d’autres acteurs, ainsi que le soutien des partenaires techniques et financiers. L’adhésion de la communauté a été totale, facilitant ainsi la mise en œuvre des activités, le choix des villages, le recrutement des apprenant-e-s et la mise à disposition des infrastructures éducatives provisoires, contribution communautaire dans cette approche. Depuis le démarrage, les CGC se sont mobilisés continuellement pour la bonne exécution du projet.

Supervision et renforcement des capacités
Les activités de supervision et de renforcement des capacités ont été intensives et multiformes, notamment par la supervision des Centres. De plus, diverses visites des ONG partenaires ont se sont déroulées, à savoir :

    • Trois visites mensuelles par les coordinateurs-trices et chargés d’éducation dans chaque centre, renforçant les pratiques des animateur-trices, assurant la fréquentation des centres et suivant les progrès des apprenant-e-s en lecture, écriture, calcul et compréhension du français.
    • Interventions des conseillers pédagogiques : Un suivi trimestriel a permis d’identifier et de résoudre des difficultés spécifiques des apprenant-e-s, telles que les problèmes de lecture, écriture et calcul.
    • Mission de suivi conjoint : La mission de suivi/supervision des centres SSA/P a été réalisée avec une structure centrale (DNEF) et deux structures déconcentrées (AE et CAP) du Ministère de l’Éducation Nationale. Elle à permis d’évaluer de manière approfondie la mise en œuvre des activités dans les régions de San et Mopti. Les résultats obtenus serviront de base pour renforcer les interventions et garantir l’accès à une éducation de qualité pour tous, conformément aux objectifs du projet FIERES et aux engagements nationaux et internationaux en matière d’éducation.
    • Appréciation du travail des CGC : Les CGC ont joué un rôle important dans la mise en œuvre de la stratégie, en informant et sensibilisant les communautés pour accroître la fréquentation des centres, en veillant à l’hygiène et au bien-être des animateur-trices et en faisant des suivis réguliers des centres.
    • Rencontres pédagogiques : Trois rencontres par partenaire ont été organisées pour améliorer les compétences des animateur-trices, incluant l’élaboration de fiches de préparation en groupe et des discussions en plénière.
    • Formation des CGC : Les membres des CGC ont participé à des rencontres pour clarifier leurs rôles, discuter de la régularité et de la propreté des centres, sensibiliser les parents et faciliter le transfert des apprenant-e-s vers les écoles d’accueil.

L’évaluation des apprenant-e-s s’est déployée en trois phases :
– Évaluation en langue nationale : Après deux mois de mise en œuvre, les animateur-trices ont collaboré avec les équipes de coordination et les CP des CAP partenaires pour évaluer les compétences des apprenant-e-s
– Évaluation à mi-parcours : Début mars, une évaluation a été réalisée pour analyser la progression des apprenant-e-s. Sur 554 enfants évalués, 496 ont obtenu la moyenne, soit 86,53 %.
– Évaluation finale : Elle s’est déroulée en deux phases : une phase orale (CVC, lecture, langage) et une phase pratique (écriture, dictée, numération, conjugaison, grammaire).

La délibération et la proposition de transfert seront effectuées par une commission ad hoc composée des directeurs d’écoles d’accueil, d’un membre du CGC et de l’animateur-trice de chaque centre, sur la base des moyennes obtenues (4,60 à 9,99/10 pour la classe de 4ème année et 3 à 4,59/10 pour la 3ème année).

En somme, ce sont 552 enfants dont 335 filles qui ont été évalués.
Parmi eux, 480 dont 293 filles soit 87 %
sont proposés pour être transférés en 4ème année, 51 dont 34 filles soit 9 % en 3ème année et 21 dont 9 filles soit 4 % en 2ème année fondamentale.
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Témoignage de Paly sur l’apport de la SSA/P

Paly, une des bénéficiaires de ces alternatives, est âgée de 12 ans. Elle est originaire du village rural dans le Cercle de Mopti. Fille de cultivateur, elle vit dans une famille de sept  enfants. Paly est handicapée et n’a jamais fréquentée l’école. « Ma non-fréquentation de l’école est liée à mon handicap physique et à l’insécurité grandissante dans mon village. Moi et mes parents nous nous sommes déplacés pour venir à Djenné, en attendant que la sécurité revienne dans le village. »

Paly a pris le chemin de l’école en 2023, avec l’arrivée du projet FIERES dans la commune urbaine de Djenné. Un pas franchi  suite à la sensibilisation sur l’éducation de  l’ONG AFAR (Action pour la Formation et l’Autopromotion Rurale) et ses  partenaires canadiens, le Centre d’étude et de coopération internationale (CECI) et la Fondation Paul Gérin-Lajoie.

Grâce au projet FIERES et l’ouverture du centre de la Stratégie de Scolarisation Accélérée/Passerelle par l’ONG AFAR (Action pour la Formation et l’Autopromotion Rurale) et ses  partenaires canadiens, Paly a été orientée avec ses camarades d’âge non scolarisés ou déscolarisés précoces lors de  la campagne 2023-2024 au centre SSA/P de Diatomé .

Paly est très courageuse et déterminée pour sa réussite à l’école. Après neuf  mois de cours, elle sait lire, écrire et calculer en langue « Bamanankan » et en français. Elle est la première du centre sur 31 apprenant-e-s avec une moyenne générale de 9,33/10 à l’évaluation finale.

« Je me sens à l’aise et surtout intégrée   avec  mes autres pairs malgré mon handicap. Je désire devenir infirmière après mes études et remercie le projet FIERES ! », témoigne-t-elle. Pour Paly, le fait de retrouver le chemin de l’école est un réel soulagement dans la mesure où elle peut espérer à un avenir meilleur.

Témoignage du Chef de village de Sokoura sur la SSA/P 


« J’ai réalisé que le taux d’abandon scolaire des enfants est significatif dans l’aire de recrutement des écoles de Sokoura. Beaucoup d’enfants, surtout les filles, sont retirées de l’école ou abandonnent pour diverses raisons, notamment la pauvreté, les mariages précoces, l’insuffisance d’enseignants qualifiés et les travaux domestiques.

L’ouverture du centre SSA/P a permis d’améliorer la donne. Le centre offre une éducation gratuite et accélérée aux enfants non scolarisés et déscolarisés âgés de 8 à 12 ans. Au bout de quatre mois déjà, les enfants apprennent les compétences nécessaires pour intégrer le système éducatif formel. Plusieurs familles ne voyaient pas l’importance de l’éducation des filles et préféraient les marier jeunes. Le centre SSA/P a permis de sensibiliser les familles à l’importance de l’éducation des filles. De plus, le centre offre un environnement sûr et protecteur aux filles, ce qui encourage les parents à les envoyer à l’école. 

Au vu de l’impact positif du centre SSA/P, je  sollicite le renouvellement du programme pour une deuxième année dans notre village. Cela permettra de récupérer les enfants des parents réticents qui ne voyaient pas d’importance au  centre SSA/P ».

Le Projet Filles et Éducation Résilientes (FIERES), financé par Affaires mondiales Canada (AMC), est mis en œuvre par un consortium composé de la Fondation Paul Gérin-Lajoie (La Fondation) et du Centre d’étude et de coopération internationale (CECI). Le projet, prévu pour une durée de cinq ans (2022-2027), se déroule dans les régions de San, Mopti et Tombouctou au Mali. FIERES a pour objectif de renforcer l’autonomisation des filles, adolescentes et femmes par l’éducation, en augmentant leur résilience et leur rôle comme agentes de changement dans leurs communautés. Le projet s’engage à assurer un accès équitable et inclusif à une éducation de qualité pour tous et toutes.

Projet : https://fondationpgl.ca/projets/fieres/