Un retour sur le projet PAREA et les défis du changement climatique

Mis en œuvre depuis l’automne 2017, le projet d’amélioration de la résilience des entreprises agricoles au Bénin (PAREA) a terminé ses activités sur le terrain le 31 mars dernier. Initiative de la spécialiste en hydrogéologie Diane Germain, de la Fondation Paul Gérin-Lajoie et de l’Université Laval, le projet PAREA venait renforcer le projet IDDA par l’apport d’un effort spécifique en vue de lutter contre les changements climatiques, notamment par l’expérimentation d’une approche agroforestière intégrant la technologie des bois raméaux fragmentés (BRF). En ce mois du Jour de la Terre, Diane Germain, spécialiste en hydrogéologie, témoigne dans cet article de son implication dans le projet.

Les jeunes personnes entrepreneures agricoles sont parmi les premières victimes du changement climatique

Au Bénin, les changements climatiques entrainent des épisodes de sécheresse plus fréquents et une saison des pluies plus tardive, engendrant d’importants facteurs de vulnérabilité pour le secteur agricole, qui est une des bases de l’économie du pays. Les problèmes de disponibilité des ressources en eau et la perte de fertilité des sols figurent parmi les manifestations les plus visibles de la dégradation de l’environnement. Plus spécifiquement, dans les zones du sud et du centre du pays. Les exploitants agricoles qui pratiquent une agriculture vivrière et qui dépendent des ressources en eau sont fortement exposés aux risques climatiques avec pour conséquences principales : une réduction de rendements agricoles et la diminution du taux de renouvellement de la couverture végétale. Les paysans qui pratiquent surtout l’agriculture pluviale sont donc les premières victimes des variations pluviométriques qui assèchent les sols, menacent les récoltes et mettent en jeu directement la sécurité alimentaire des populations.

Présente au Bénin à travers son programme pour l’insertion durable des jeunes diplômés du secteur agropastoral (IDDA), la Fondation Paul Gérin-Lajoie et ses partenaires locaux ont rapidement noté que les jeunes entrepreneurs du secteur du maraîchage étaient affectés par les variations climatiques importantes, au point que la production et la rentabilité de leurs entreprises étaient menacées.

Sur sa proposition et accompagné de l’Université Laval, Madame Germain, spécialiste en hydrogéologie, a décidé d’approfondir ses champs d’intervention en termes d’adaptation aux changements climatiques en mettant en œuvre le Projet d’Amélioration de la résilience des entreprises agricoles au Bénin (PAREA).

Crédit photo : Arthur Kpognin | Instrumentation : sonde pour la teneur en eau de pores.

Un mot clé : la curiosité

Le projet PAREA a permis de réaliser des recherches scientifiques sur la technologie des bois raméaux fragmentés et d’expérimenter ces techniques d’enrichissement des sols, de rétention d’eau et de captation de carbone au sein des Lycées techniques agricoles (LTA) du projet IDDA. C’est ainsi qu’en décembre 2017 envoyée au Bénin par la Fondation pour le démarrage du projet, Diane Germain découvrait pour la première fois le Bénin : « Le mot clé pour moi, ça a été la curiosité. J’étais curieuse d’apprendre une autre culture. Avec ce projet, j’ai créé de nouveaux contacts, je me suis ouverte à d’autres cultures. Dans un certain sens, cela met aussi en question nos valeurs, notre rapport au travail (le stress), le gaspillage de nourriture ou de l’eau ici. J’ai aussi maintenant une meilleure compréhension des difficultés auxquelles font face les pays en développement avec les changements climatiques ».

Crédit photo : Diane Germain

Les défis de la formation à distance

Madame Germain a séjourné à deux reprises au Bénin. En juillet dernier, à cause de la COVID-19, elle a dû se résoudre à faire à distance une partie des activités prévues pour sa troisième mission planifiée au projet, notamment une formation de formateurs sur les techniques agricoles d’enrichissement des sols avec une analyse détaillée de la technique des BRF.

Cette formation donnée par Diane Germain aux chercheurs supervisés et à deux professeurs des LTA a été depuis reprise devant des enseignants des lycées du projet IDDA et des entrepreneurs agricoles encadreurs de stages des élèves de ces établissements : « Former à distance est un défi, mais les personnes étudiantes et professeures étaient très participatifs, elles avaient beaucoup de questions. Certaines ont mis en pratique les enseignements de la formation pendant le cours qui s’est échelonné sur plusieurs séances ».

Madame Germain mentionne d’ailleurs être toujours en contact avec certaines personnes étudiantes. Un engagement auquel elle tient, poussée par la conviction qu’une partie des solutions à la crise climatique se trouve dans l’agriculture : « Avec PAREA, j’étais vraiment curieuse de voir quel impact pouvaient avoir les BRF sur la séquestration du carbone. Je suis convaincue que la manière de cultiver le sol va faire en sorte que l’on va pouvoir séquestrer beaucoup plus de carbone dans les sols que ce qu’on fait présentement ».

Aujourd’hui terminées, les expérimentations sur les BRF ont été menées sur les sites des LTA de Kika et de Sékou sur une vingtaine de parcelles de cultures de tomates et de gombo pendant 26 et 29 mois. Elles ont été dirigées par plusieurs étudiants en maîtrise des universités béninoises d’Abomey Calavi et de Parakou en collaboration avec les personnes apprenantes des lycées et sous la supervision de Madame Germain et du doctorant Rodrigue Daassi de l’Université Laval.

Si les activités au Bénin, avec le projet PAREA se sont terminées depuis le 31 mars dernier, le travail de recherche se poursuit à l’Université Laval avec le Doctorant Rodrigue Daassi qui doit encore analyser les échantillons de sols et de BRF qu’il a reçus du Bénin puisqu’à cause de pandémie Covid-19 il n’a pu s’y rendre. Le dépôt des conclusions de la recherche est prévu quant à lui en octobre 2021. De son côté, Madame Germain est ouverte à d’autres projets, mais précise-t-elle : « j’aimerais voir un projet uniquement pour des femmes en agriculture, parce qu’ici ou ailleurs, elles sont souvent mises de côté ou présentes à 20 ou 30%. Un projet pour elles, point! ».